Cantonales 2011 : Ouangani

 

Un patrimoine rural à développer

Cette année, les observateurs de la vie politique mahoraise auront un œil attentif sur le scrutin cantonal à Ouangani. En effet, l’un des poids lourds de la majorité actuelle, Hadadi Andjilani, remet son siège en jeu. Face à lui, trois candidats dont deux ex-compagnons de route. Seule commune à ne pas disposer de façade maritime sur l’île, Ouangani compte donc sur son patrimoine rural pour se développer.

 

 

 

lacé au centre de Mayotte et limitrophe des communes de Sada, Chiconi, Dembéni, Tsingoni, Chirongui, et Mamoudzou, le canton de Ouangani a des atouts pour devenir la plaque tournante de ce secteur de l’île. Pour l’instant, il ne le joue pas pleinement, mais les choses pourraient être amenées à changer à l’avenir.

 

 

Pour un canton qui a une tradition agricole, avec tous les services de la direction de l’agriculture et des ressources terrestres et maritimes (DARTM) du conseil général installés à Coconi, la présence du lycée agricole toujours à Coconi et l’organisation de marchés paysans, quoi de plus normal que de compter sur ces atouts pour se développer.

 

Mais pour Thaoubani Ayouba, candidat du Nouveau Centre, certaines choses doivent changer. “Il y a eu beaucoup d’argent donné au secteur agricole et rien ne se fait. Au contraire, on importe de plus en plus de denrées alimentaires. On doit repenser le système, se fixer des objectifs et faire en fonction des moyens que l’on a. On ne prétend pas tout produire, mais au moins ce qu’il est possible de faire”, indique-t-il passablement énervé. L’agriculture vivrière selon lui doit laisser la place à une réelle agriculture productive pour que les agriculteurs puissent gagner leur vie avec les fruits de leur récolte.

 

Hadadi Andjilani quant à lui compte valoriser le patrimoine rural et agricole pour créer des emplois. Mais les trois candidats que nous avons rencontrés savent que ce développement du secteur agricole devra être combiné au tourisme vert.

 

“Ce sont les entreprises qui créeront la richesse”

 

“Le CDTM (comité départemental de tourisme) subit des difficultés financières, les ministres et secrétaires d’Etat mettent l’accent sur les potentialités du tourisme à chaque visite à Mayotte, mais il faudrait prendre des mesures pour faire décoller les choses”, intime pour sa part Rastami Abdou, candidat du MDM. Ouangani étant l’un des points de départ pour de nombreuses randonnées, Thaoubani Ayouba insiste pour que les sentiers de randonnée et de forêt du canton soient balisés pour attirer les “randotouristes”.

 

Il demande par ailleurs un véritable “plan Marshall” pour l’agriculture et l’artisanat en collaboration avec les chambres consulaires (Capam et CMA). “Il faut donner des choses à voir aux touristes. Aucun organisme ne créera de l’emploi pour tous les jeunes. Les jeunes mahorais doivent être créatifs pour s’insérer dans l’artisanat traditionnel ou contemporain”, soutient-il.

 

Si l’agriculture et le tourisme sont considérés comme des moteurs de l’économie à venir du canton, et dans une moindre mesure de l’île, ils espèrent attirer des investisseurs d’autres secteurs pour dynamiser l’économie. A cet effet, Hadadi Andjilani prévoit la création d’une zone d’activité économique, artisanale et agro-alimentaire. “C’est prévu dans le PLU de la commune. Il faut soutenir les investisseurs car ce sont les entreprises qui créeront la richesse”, prédit-il. Thaoubani Ayouba mise lui sur une pépinière d’entreprises pour attirer les potentiels jeunes créateurs d’entreprises à se lancer et mutualiser leurs maigres moyens à leurs débuts.

 

Une véritable université pour casser la spirale de l’échec dans l’enseignement supérieur

 

Rastami Abdou ne croit pas que Hadadi Andjilani sera l’homme de la situation dans le domaine économique. En effet, pour le candidat MDM, le 3^e vice-président en charge des finances est l’un des responsables du marasme actuel et de l’arrêt des dépenses d’investissement et des licenciements ou non renouvellements de contrat qui en ont découlé dans certaines entreprises du BTP.

 

“Investir aurait permis aux entreprises de fonctionner et de donner de l’emploi aux Mahorais”, constate-t-il. Pour occuper ces futurs emplois, encore faut-il que les structures de formation existent pour former des personnes compétentes et que les besoins soient identifiés et communiqués.

 

“Il faut une adéquation entre l’offre et la demande. Les entreprises cherchent des gens qualifiés et on se permet de refuser la construction du CFPA dans le canton de Ouangani. On a liquidé le Cnam pour 160.000 €, c’est lamentable. Il fallait soutenir cet organisme pour que les jeunes aient plus de chances de rentrer sur le marché du travail. La formation et l’éducation ne sont pas des priorités pour la majorité actuelle. Il n’y a qu’à voir les différents mouvements des enseignants”, s’insurge Rastami Abdou.

 

Dans le domaine de la formation, Thaoubani Ayouba pense que l’envoi des jeunes Mahorais (la CDM y consacre 80 millions d’euros par an) dans l’Hexagone pour y suivre des études supérieures a conduit à trop d’échec. Selon lui, l’installation d’une véritable université dans laquelle un cycle complet peut être obtenu - et non une antenne universitaire telle que promise par le président Sarkozy - pourrait enrayer la spirale de l’échec.

 

“Nos étudiants font la grève de la faim, ils sont en difficulté”

 

“Il ne faut pas nous dire que le nombre d’étudiants est insuffisant pour bâtir cette université. Il faut amener les autres à venir étudier chez nous par le biais de la coopération décentralisée. Il y a bien des Malgaches, des Comoriens ou des Mauriciens qui vont étudier à la Réunion, pourquoi ne le feraient-ils pas ici ?”, s’interroge le candidat du Nouveau Centre.

 

Rastami Abdou n’est pas dans la même perspective. Pour lui, c’est la Dasu (Direction des affaires scolaires et universitaires) dans son ensemble qu’il faut réorganiser, pour ne plus que les étudiants mahorais souffrent d’un versement différé de bourses ou d’une attribution arbitraire. “Nos étudiants font la grève de la faim, ils refusent d’envoyer leur procuration pour les élections, ils sont en difficulté. Pourquoi les envoyer à 10.000 km, si c’est pour les mettre dans des conditions pareilles ?”, demande le candidat du MDM.

 

S’il est élu, il compte faciliter les démarches administratives des étudiants, en évitant que les mêmes papiers soient redemandés à chaque fois et que le certificat de scolarité suffise à l’obtention de la bourse, au lieu de demander une attestation d’assiduité qui n’a aucun sens à l’université.

 

Le mandat de 3 ans est considéré comme court, mais les candidats savent qu’ils seront les acteurs majeurs de la mise en branle du département. 2014, c’est déjà très proche, et ils ont promis de travailler tout de suite pour que dans 3 ans un maximum de choses soient prêtes pour entrer véritablement dans le département. En seront-ils capables ? Seul l’avenir nous le dira.

 

Faïd Souhaïli

Source: Mayotte Hendo